Et si... on taxait les milliardaires ? Entretien avec Quentin Parrinello
Introduction : Il y a eu une intervention publique pour rassurer les marchés, ce qui a fait grimper les cours des bourses. Le dernier boum de la fortune des milliardaires est donc dû à une intervention publique. Si l’on regarde le taux de croissance du patrimoine des milliardaires sur les quarante dernières années, et qu’on retire l’inflation, on constate qu’il est de l’ordre de 7 à 8 % par an. En comparaison, le taux de croissance du revenu des ménages moyens à travers le monde a été de 1 à 2 %. Plus on peut mettre de l’argent de côté, plus il est facile de réinvestir dans les produits les plus spéculatifs, qui ont les rendements les plus hauts. La capacité des milliardaires à tirer un rendement de leurs actions est ainsi extrêmement forte. De plus, ils possèdent des entreprises et dictent les politiques de distribution de dividendes et de rachats d’actions. Cela a un impact énorme sur les cours de leurs actions, et donc sur leur fortune.
Extrait : Oui. La concentration des richesses entre les mains de 3 000 familles est extrêmement forte. C’est injuste, c’est un facteur d’inégalité, mais c’est aussi un risque de capture politique et d’atteinte au bon fonctionnement de la démocratie. Les personnes aussi riches peuvent faire sécession avec le reste de la société, c’est-à-dire ne plus avoir besoin d’écoles publiques ni d’hôpitaux publics, etc., parce qu’ils ont leurs propres services. Par ailleurs, l’État dépend d’eux pour certains investissements, ce qui est contraire au système démocratique où l’État est l’expression de la volonté populaire démocratique. …. Le temps où l’on pouvait baisser les impôts des plus riches et des multinationales et le répercuter en augmentant les impôts sur les classes moyennes et les classes populaires est passé.
De même, justifier cela par des coupes sur les services publics deviendra de plus en plus difficile. Aucune majorité politique n’a de mandat pour couper dans l’hôpital public. La résistance face à ce genre de politique est beaucoup plus forte aujourd’hui qu’il y a 10 ou 15 ans. Et cela témoigne aussi de la compréhension d’un fait très important : la fiscalité est politique.
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